Des médecins français se rebellent et décident de soigner les patients atteints du Coronavirus avec de la chloroquine

Publié le 23 mars 2020

Dans une course effrénée pour découvrir un traitement contre le Covid-19, des médecins et chercheurs du monde entier ont mobilisé leurs ressources. En France, le professeur Didier Raoult de l’IHU Méditerranée Infection prône l’efficacité de la chloroquine, un antipaludéen qui existe sur le marché depuis de nombreuses années. Si des tests préliminaires ont retenu l’attention du gouvernement qui a autorisé des essais cliniques à plus grande échelle, la prudence de la communauté scientifique est toujours d’actualité dans l’attente de résultats sans équivoque sur l’usage de cette molécule. Des délais qui ne font pas l’unanimité auprès de certains médecins à Marseille. Dans un communiqué de l’IHU publié ce dimanche 22 mars, six d’entre eux invoquent le serment d’Hippocrate pour soigner les personnes contaminées avec de la chloroquine. Une information relayée par France Bleu.

C’est à Marseille que l’équipe du Pr Raoult a annoncé sa décision de traiter les patients infectés avec de la chloroquine et ce, sans attendre les conclusions d’études thérapeutiques. Invoquant leur devoir de médecin, six membres de l’IHU souhaitent généraliser l’utilisation de la molécule, malgré les recommandations officielles des autorités.

La chloroquine, une molécule qui fait débat

Cible de nombreuses critiques, le Pr Raoult avait mené un test sur 24 patients pour évaluer l’efficacité de la chloroquine. Dans une vidéo publiée le lundi 16 mars, ce dernier expliquait que “25 % seulement des patients seraient encore porteurs du virus, la proportion étant de 90 % chez ceux ne recevant pas le traitement”. Des résultats préliminaires jugés prometteurs par le gouvernement qui, à l’issue d’un Conseil des ministres, a autorisé des essais cliniques indépendants de l’équipe du professeur pour évaluer l’efficacité de ce traitement. Sibeth Ndiaye, porte-parole du gouvernement en a toutefois appelé à la prudence, car les preuves scientifiques manquent encore. Un avis partagé par de nombreux experts qui pointent du doigt “l’absence d’études plus poussées ainsi que “ses effets indésirables qui peuvent être graves”, souligne LCI.

Pour Olivier Véran, ministre de la Santé, “Il est absolument fondamental d’asseoir toute décision de politique publique en santé sur des données scientifiques validées, et les processus de validation, on ne peut pas négocier avec”.

Le dépistage systématique

Si l’Agence régionale de santé rappelle dans un communiqué que le dépistage n’est plus systématique “en phase épidémique”, le Pr Raoult et son équipe ont annoncé ce dimanche le dépistage de toute personne “fébrile” qui se présente à l’institut hospitalo-universitaire Méditerranée Infection. “Nous avons décidé pour tous les malades fébriles qui viennent nous consulter, de pratiquer les tests pour le diagnostic d’infection à Covid-19”, peut-on lire sur le communiqué alors que le test est actuellement réservé à des populations spécifiques comme les personnes âgées, fragiles ou encore les femmes enceintes, précise le 20 Minutes.

Le serment d’Hippocrate

Six médecins ont invoqué leur devoir médical et les règles morales de leur profession pour faire bénéficier les malades de “la meilleure prise en charge  pour le diagnostic et le traitement d’une maladie”. Cette décision aurait été prise en accord avec les “données les plus récemment acquises de la science médicale” et ce, malgré le fait que l’IHU n’ait pas d’autorisation pour la généralisation du traitement. A cet effet, le Dr Philippe Brouqui, l’un des médecins de l’équipe, invoque l’affirmation solennelle. Il explique à France Bleu, “À ce stade, le seul traitement ayant prouvé son efficacité, c’est celui que nous employons. Je ne fais donc que respecter le serment d’Hippocrate”.

C’est ainsi que le Pr Didier Raoult et cinq de ses confrères ont annoncé, en plus du dépistage assuré au CHU, vouloir traiter dès le diagnostic, les patients infectés. Selon les informations fournies par l’IHU, le traitement consiste à associer de l’hydroxychloroquine et l’Azithromycine, le tout “dans le cadre des précautions d’usage de cette association”. L’association d’un antibiotique à large spectre est également mentionnée en cas de pneumonie sévère.

Selon Pierre Jouan, président du Conseil régional de l’Ordre des médecins Paca, il s’agit d’un traitement “hors AMM”, signifiant que ce dernier “n’a pas obtenu d’autorisation à être mis sur le marché dans le cadre de la lutte contre le Covid-19”, rapporte France Bleu en précisant toutefois que ce dernier “soutient la démarche de l’IHU”. Le Pr Brouqui quant à lui conclut en ajoutant que “L’histoire nous dira si on a bien fait ou pas. C’est l’histoire qui nous le dira. »