Comment faire face aux maladies parodontales ?
Gingivite et parodontite sont moins connues que les caries, mais elles peuvent aussi faire de gros dégâts. D’où viennent ces maladies parodontales ? Du simple détartrage à la chirurgie, quelles sont les options pour y faire face ? Tout ce qu’il faut savoir pour garder longtemps le sourire.
Il ne se voit pas à l’œil nu. Mais sa solidité est essentielle pour maintenir les dents en place, et leur permettre de bien jouer leur rôle. Le parodonte, puisque c’est de lui qu’il s’agit, représente l’ensemble des tissus qui soutiennent la dent. « Il comprend la gencive, l’os, les ligaments, et le cément, qui est la fine couche qui recouvre la racine de la dent », énumère le professeur Marjolaine Gosset, parodontiste à l’hôpital Charles-Foix (APHP) à Ivry-sur-Seine, présidente scientifique de la Société Française de Parodontologie et d’Implantologie Orale (SFPIO). Le parodonte est aux dents ce que les fondations sont pour une maison : un élément essentiel pour éviter que la « construction » ne s’écroule. Les maladies parodontales sont causées par les bactéries de la plaque dentaire. Celle-ci induit une inflammation chronique du parodonte qui, chez certains patients, va se détruire, souvent à petit feu, sur plusieurs dizaines d’années. « Ces maladies commencent souvent vers l’âge de 30-40 ans. Elles sont très fréquentes, 50 à 60 % de la population a une parodontite », affirme le professeur Gosset. C’est la principale cause de perte de dents chez les adultes.
Saignement des gencives et mauvaise haleine
Quand le parodonte est atteint, en général, le patient ne sent rien. Pas de douleur donc. Le premier signe qui doit mettre sur la piste d’une maladie parodontale, c’est en fait un saignement des gencives pendant le brossage. Les fumeurs, eux, saignent rarement des gencives. Cela ne signifie pas que la maladie parodontale ne progresse pas, bien au contraire ! Si l’inflammation en superficie est masquée par la consommation de tabac, elle continue à se propager en profondeur. D’où la nécessité, encore plus chez eux, de consulter régulièrement un chirurgien-dentiste. Les gencives peuvent ensuite devenir rouges et enflées. « L’autre symptôme classique d’une maladie parodontale, c’est une mauvaise haleine, signe que les bactéries s’accumulent dans la bouche. » Enfin, il y a également la rétraction des gencives, qui fait apparaître les dents plus longues, ceci est un autre symptôme des maladies parodontales. Cette rétraction peut être une destruction causée par l’infection et l’inflammation, mais le plus souvent, elle est due à un brossage trop agressif. Elle peut rendre un sourire disgracieux, et s’accompagner d’une hyper sensibilité au froid.
En chiffres
-Seules 2,2 brosses à dents* par an et par habitant sont utilisées, en moyenne, en France, loin des 4 recommandées.
-Alors que 6 tubes de dentifrice* par personne et par an seraient nécessaires pour une bonne hygiène bucco-dentaire, seuls 3,6 tubes sont consommés actuellement dans notre pays.
*Communiqué de l’UFSBD (Union Française pour la Santé Bucco-Dentaire) de mars 2022.
D’un stade à l’autre
La gingivite est une inflammation de la gencive causée par l’accumulation de plaque dentaire. L’atteinte reste superficielle, les tissus sous-jacents sont intacts. « Elle est réversible, car il n’y a pas de destruction en profondeur », rassure le professeur Gosset. Non traitée, elle peut dégénérer en parodontite, plus sérieuse. Cela signifie que la plaque bactérienne s’est étendue, et s’est infiltrée entre la dent et la gencive. Les bactéries entraînent une réaction inflammatoire, qui au fil du temps, peut causer de gros dégâts. Le volume des gencives et des os se réduit de manière insidieuse, les « fondations » de la dent sont attaquées. « Quand les tissus ont été détruits, il n’y a plus de support stable. Les dents peuvent alors bouger, changer de position, et finir par tomber. Ce passage d’un stade à l’autre n’est cependant pas systématique. Il y a l’inné, certains seront plus touchés que d’autres, même jeunes. » C’est le terrain génétique contre lequel on ne peut rien. À l’inverse, il est possible d’agir sur les facteurs environnementaux, comme le tabac, ou un diabète mal équilibré, qui peuvent aussi affecter le parodonte. Le stress, un régime déséquilibré, la grossesse, et la prise de certains médicaments, sont d’autres facteurs favorisants.
Le patient, acteur de sa santé
« Mieux vaut prévenir, plutôt que guérir », l’expression galvaudée retrouve ici tout son sens. Tout commence par une hygiène buccodentaire irréprochable. « Le brossage doit être réalisé deux fois par jour, matin et soir, pendant 2 à 3 minutes. À compléter par un nettoyage entre les dents à l’aide d’un fil dentaire ou de brossettes. » Ce brossage minutieux doit permettre d’éliminer en grande partie la responsable, la plaque dentaire. « Prévenir, c’est d’abord modifier les facteurs de risque. Le patient doit devenir pleinement acteur de ses soins. Car, c’est un fait, le style de vie a un impact important sur les maladies parodontales. Pour les tenir à distance, il est recommandé d’avoir un diabète équilibré, une alimentation variée, et de ne pas fumer. » Car le tabac ne provoque pas, mais il aggrave la maladie parodontale. Le chirurgien-dentiste, lui, doit être consulté au minimum une fois par an. Il pourra réaliser un détartrage si besoin, si la plaque dentaire a durci et s’est transformée en tartre. Le plus souvent, ce geste est réalisé avec un instrument manuel, ou à ultrasons, et suivi d’un polissage des dents, pour compliquer le travail des bactéries, ces dernières s’accrochant plus facilement à une surface rugueuse que lisse. Le détartrage est remboursé par la Sécurité sociale, une raison de plus de ne pas sauter ce rendez-vous important ! « Éliminer le tartre va diminuer l’inflammation des tissus. » Les maladies parodontales étant souvent silencieuses, consulter régulièrement un chirurgien-dentiste permet aussi de détecter au plus tôt une parodontite débutante, pour la traiter sans tarder, et éviter d’en arriver au stade de la perte de dents.
Au-delà des apparences
Prendre soin de votre sourire ne sert pas qu’à faire de jolis selfies ! Car les maladies parodontales peuvent nuire à la santé, bien au-delà de la sphère buccale. Leurs bactéries entretiennent un état inflammatoire et peuvent entraîner des dégâts à distance. Elles peuvent ainsi compliquer la gestion du taux de glycémie chez les diabétiques, augmenter le risque de maladies cardiovasculaires, ou favoriser les accouchements prématurés.
Le surfaçage radiculaire, un nettoyage très profond
Quand le détartrage ne suffit pas, un surfaçage va permettre d’aller nettoyer les dépôts bactériens cachés sous la gencive. Le plus souvent, ce surfaçage est réalisé à l’aide d’une curette ou d’ultrasons, sous anesthésie locale. Il peut aussi l’être avec un laser. « L’efficacité des lasers est similaire à celle des outils classiques, affirme le professeur Gosset. Quelle que soit la méthode, il s’agit de nettoyer en profondeur pour éliminer un grand nombre de bactéries pathogènes.
D’ailleurs, ce soin demande plus de temps qu’un simple détartrage : compter d’une à quatre séances. On patiente ensuite environ deux mois, le temps de la cicatrisation, avant de faire un bilan. Si c’est suffisant, on maintiendra une bonne hygiène bucco-dentaire, et un suivi régulier chez le dentiste, pour éviter la récidive. » La pathologie peut être stabilisée grâce à l’adoption au quotidien des bons gestes, mais elle ne se guérit pas. Si le brossage se fait plus épisodique, ou moins minutieux, il peut y avoir une rechute. « Parfois, un accès chirurgical aux lésions peut être nécessaire, sous anesthésie locale, pour finir le nettoyage. » On décolle alors la gencive de l’os à l’aide d’un scalpel, afin de pouvoir nettoyer la zone atteinte.
Quand les dents menacent de tomber
Quand la parodontite arrive à un stade avancé, les dents deviennent de plus en plus instables, et peuvent finir par tomber. Pour les remplacer, il y a alors plusieurs alternatives. La prothèse amovible, autrement dit le dentier, qui peut être psychologiquement mal acceptée. La deuxième solution est le bridge, sa pose nécessite de tailler les dents de chaque côté, pour former un pont sur lequel la couronne va remplacer la dent absente. La troisième alternative est l’implant, qui lui ne détériore absolument pas les dents voisines. Il s’agit d’une vis en titane placée dans l’os, sur laquelle on vient poser une dent artificielle, une couronne le plus souvent. À long terme, il s’agit de la solution la plus confortable, la plus solide, et la plus esthétique. Si la maladie parodontale a détruit de l’os, une reconstruction osseuse pourra être nécessaire au préalable. « Les greffes de gencive, elles, peuvent venir renforcer la gencive, recréer une harmonie. Plusieurs techniques cohabitent, elles donnent de bons résultats. » Le plus souvent, le greffon sera prélevé au niveau du palais. Remettre de la gencive là où il en manque permet de protéger les parties dénudées et sensibles des racines des dents, et ainsi de diminuer la sensibilité au froid. Cela donne aussi un plus joli sourire. Seul le détartrage est remboursé par l’Assurance maladie. Tous les autres traitements des gencives ne le sont pas. Le praticien doit donc vous remettre un devis indiquant ses honoraires. Certaines mutuelles remboursent tout ou partie des soins.