Hystérectomie ou ligature des trompes ? Quelles sont les différences et laquelle est recommandé comme contraceptif
La volonté de concevoir peut ne pas être présente chez la femme. Pour empêcher le risque de grossesse, elle peut décider de recourir à une stérilisation irréversible, à savoir l’ablation de l’utérus ou encore la ligature des trompes. Des interventions qui sont toutes deux différentes et spécifiques selon les cas.
Interrogé par nos confrères du Journal des Femmes, Philippe Deruelle, gynécologue et secrétaire général du Collège National des Gynécologues et obstétriciens, explique le déroulé de la ligature des trompes, une méthode de contraception définitive. Le spécialiste indique également les risques et toutes les conditions pour procéder à cette technique de stérilisation.
Se faire ligaturer les trompes : un effet contraceptif immédiat
Egalement appelée ligature tubaire, cette intervention à laquelle recourent les femmes qui ne souhaitent plus avoir d’enfant, repose sur la section ou la coagulation de la trompe, un canal qui permet aux spermatozoïdes de pénétrer l’ovocyte. Une procédure à l’effet immédiat et irréversible. Cet acte médical est destiné aux femmes qui ne souhaitent pas ou plus être enceintes et qui ne désirent pas recourir à certaines contraceptions comme la pilule qui sont contre-indiquées pour les fumeuses ou celles qui sont atteintes de troubles de la circulation veineuse. Pour se faire ligaturer les trompes, il n’y a aucune condition d’âge, d’accord du conjoint ou de condition du nombre d’enfants.
Comment se déroule la ligature des trompes ?
Cette intervention réalisée par un gynécologue succède d’abord à une consultation ou le spécialiste informe la patiente du déroulé de l’acte médical mais aussi des potentielles complications. Le médecin propose également dans cette situation, les méthodes de contraception alternatives et renseigne sur les conséquences définitives de cette stérilisation. Ensuite, celle qui en fait la requête est soumise à un délai de réflexion de quatre mois où elle pourra se rétracter. Une fois passée cette période, elle devra consigner son consentement par écrit pendant le second rendez-vous. « La ligature des trompes se fait dans la majorité des cas par voie cœlioscopique », explique le docteur. Cette méthode de stérilisation repose sur une incision sur le nombril où sera insérée une mini-caméra et deux petites tiges cylindriques destinées aux biopsies et au ponctions placées au niveau de l’appendice. Pour ligaturer les trompes, il existe quatre méthodes : l’application d’un clip sur ce canal, sa coagulation, la section ou la ligature. Cette dernière option reste rarement réalisée. « Elle peut être pratiquée chez des patientes qui savent par avance qu’elles accoucheront par césarienne et qui souhaitent profiter de cette intervention pour avoir recours à une ligature des trompes », informe l’expert. La ligature des trompes est réalisée en ambulatoire et la patiente est sous anesthésie générale pendant cet acte médical qui dure quinze minutes.
Cette intervention est-elle douloureuse ?
Cette méthode de stérilisation n’est pas très douloureuse mais peut provoquer un inconfort chez la patiente lors de l’introduction des trocarts [ndlr : tiges insérées dans l’appendice]. La sensation de l’air dans le diaphragme peut être légèrement douloureuse. Suite à la ligature des trompes, une cicatrice de 2 à 3 mm indolore est présente sur le ventre. En ce qui concerne les complications post-opératoires, Philippe Deruelle prévient que ce sont les mêmes que toute autre intervention chirurgicale avec anesthésie générale. Le spécialiste indique que rarement, un vaisseau sanguin, un nerf avoisinant ou une partie de l’intestin peuvent être blessés ou que la patiente subisse des saignements de la trompe. Il ajoute que le réveil après l’anesthésie peut être difficile et que la patiente souffre de douleurs à l’abdomen pendant quelques jours. L’expert n’exclut pas le risque d’infection qui peut être inhérent à une ligature des trompes.
Un acte médical aux conséquences définitives
Bien qu’il existe des cas où la ligature des trompes échoue et conduit dans ce cas à une grossesse extra-utérine, le succès de cette intervention est de plus de 99%. C’est pour cette raison que la procédure avant l’opération est longue et impose un délai de réflexion de quatre mois. « Cette technique pose encore des problèmes d’autant plus lorsqu’on connaît le nombre actuel de couples qui se séparent, divorcent ou se remarient et dont les projets de vie peuvent vite évoluer », analyse le médecin qui ajoute que c’est la raison pour laquelle lui et ses confrères insistent sur le caractère irréversible de cet acte gynécologique. Le spécialiste indique que cette méthode de contraception irréversible est plus courante dans les pays anglo-saxons que dans les pays latins, où les gynécologues sont plus réticents à la pratiquer sur une patiente jeune, sans enfants et qui peut utiliser d’autres méthodes de contraceptions telles que la pilule, le stérilet ou encore l’implant.
Quelles sont les contre-indications à la ligature des trompes ?
Le gynécologue indique que cet acte chirurgical sous anesthésie générale n’a pas de contre-indication et que l’âge ne constitue pas un obstacle tant qu’il existe un consentement de la part de la patiente. « Une femme qui n’a jamais eu d’enfants, devrait, si elle le souhaite, pouvoir en bénéficier sans problème » affirme le médecin. Pour autant, cette méthode de contraception peut être à l’origine de complications chez les femmes dont l’anesthésie générale ou la cœlioscopie sont contre-indiquées. Les patientes qui ont eu une infection gynécologique il y’a moins de six semaines devront attendre avant de recourir à cet acte de stérilisation.
Quelles sont les conséquences de la ligature des trompes sur la sexualité et les règles ?
Si cette intervention provoque la stérilité, la vie après une ligature des trompes n’est pas impactée sur le plan hormonal ou sexuel. Le spécialiste explique que les menstruations ne sont pas bouleversées puisque les règles proviennent des ovaires et de l’utérus. « La femme continue d’ailleurs d’ovuler », précise le médecin qui ajoute que cet acte ne provoque pas de symptômes de ménopause en raison de son inaction sur les hormones. Seulement, des retards de règles et des saignements peuvent survenir et ces signes doivent amener la femme à consulter. Cette intervention définitive ne compromet pas le désir sexuel ou le plaisir.
Qu’est-ce que l’ablation de l’utérus ?
Le docteur Brigitte Letombe, gynécologue médicale et obstétrique, explique le déroulé de l’hystérectomie qui peut être totale, subtotale ou radicale. Cet acte chirurgical consiste à retirer l’utérus de façon partielle ou entière. La spécialiste parle de cette invention comme un acte qui nécessite de la réflexion. « Il existe plusieurs types d’hystérectomie, qui en plus de rendre stérile, peuvent entraîner ou non une ménopause », prévient le médecin. Elle ajoute que c’est pour cette raison que la patiente doit connaître toutes les options de contraception avant de consentir à cet acte médical. L’hystérectomie totale avec salpingo-ovariectomie et l’hystérectomie radicale, sont réalisées en cas de cancers très invasifs. L’hystérectomie subtotale est le retrait du corps utérin sans toucher au col. Lorsqu’elle est totale, cette ablation concerne ces deux parties. Dans ces deux cas, les hormones et la lubrification vaginale ne sont pas perturbées car les ovaires sont intacts. L’hystérectomie totale avec salpingo-ovariectomie implique le retrait du corps utérin, le col de l’utérus, les trompes de Fallope et les ovaires. C’est cette intervention qui entraîne la suppression des cycles hormonaux. L’ablation radicale de l’utérus est réalisée à la suite d’un cancer gynécologique invasif. Au cours de cet acte médical, le spécialiste de cette chirurgie procède au retrait de l’utérus, des trompes, des ovaires mais aussi d’un tiers supérieur du vagin et des ganglions lymphatiques. Une procédure qui entraîne également une ménopause, une période qu’il est possible de vivre en douceur avec 10 manières naturelles.
Quand choisir l’hystérectomie ?
Si l’hystérectomie provoque la stérilité à l’instar de la ligature des trompes, c’est une intervention indiquée chez les femmes de plus de 50 ans qui souffrent de maladies avec des symptômes sévères qui ne peuvent être soulagés par un traitement médicamenteux. On cite de ce fait, les cancers de l’endomètre ou du col de l’utérus, la dénomiose, le prolapsus génital, un utérus fibromyateux ou polymyomateux qui sont caractérisés par une tumeur bénigne dans le muscle utérin et le tissu fibreux de l’utérus. L’hypertrophie, l’hyperplasie de l’endomètre ou les polypes récidivants peuvent nécessiter cet acte chirurgical.
Comment se déroule l’hystérectomie ?
Un chirurgien généraliste peut procéder à cette intervention même si les gynécologues obstétriciens tendent de plus en plus à la réaliser. Et pour cause, il s’agit de spécialistes qui ont une expertise complète dans les chirurgies des ovaires par voie vaginale. Plusieurs techniques permettent de réaliser l’hystérectomie : par voie vaginale, par voie coelioscopique ou par laparotomie. Brigitte Letombe explique que c’est la première, également appelée voie basse qui est la plus privilégiée et ce particulièrement pour les hystérectomies totales. La voie coelioscopique est indiquée pour les ablations subtotales de l’utérus et implique l’introduction de petits tubes dans l’abdomen. Lorsque l’utérus est trop volumineux à cause de gros fibromes, le chirurgien gynécologue pourra recourir à la laparotomie qui est réalisée grâce à une incision dans l’abdomen. Dans ce cas, cette opération nécessite un arrêt de travail d’environ un mois.
Quelles sont les complications ?
Comme pour la ligature des trompes, les complications liées à cette intervention chirurgicale sont rares. « Ce sont celles liées au geste chirurgical : saignement, infections, thrombose, phlébite », indique la gynécologue. D’autres complications telles que l’hémorragie ou l’infection peuvent découler de cette opération mais sont facilement traitées. Pour prévenir la phlébite ou l’embolie pulmonaire suite à l’hystérectomie, le médecin administre un anticoagulant.
Quels sont les effets secondaires après cette chirurgie ?
Une hystérectomie peut provoquer de la douleur et de la fatigue, des symptômes traités par des médicaments lors de l’hospitalisation. D’autres effets secondaires tels que les saignements vaginaux, une incontinence, un transit ralenti ou une surinfection peuvent survenir et représentent 10% des risques. Pour autant, ces conséquences ne sont pas durables et sont observées quelques semaines. Brigitte Letombe précise qu’après une ablation de l’utérus, les patientes n’entrent pas forcément en ménopause. « Cela se produit uniquement quand les ovaires sont enlevés, donc dans le cas de l’hystérectomie totale avec annexectomie bilatérale et de l’hystérectomie radicale », souligne l’experte qui ajoute que des symptômes comme les bouffées de chaleur, la sécheresse vaginale peuvent en découler et ce de manière plus intense qu’une ménopause naturelle qui se caractérise par d’autres signes. C’est pour cette raison que le médecin recommande à ses patientes de réfléchir avant de retirer tout l’utérus.
Quelle est la durée de convalescence d’une hystérectomie ?
Pour se remettre d’une hystérectomie, une patiente devra compter de 6 à 8 semaines. La laparotomie devra demander une plus grande période de convalescence. « Il faut avoir une vie avec le moins d’efforts possible (sans sport excessif) pendant trois ou quatre semaines, et compter un arrêt de travail d’un mois environ », recommande le médecin. La patiente qui a subi une ablation de l’utérus doit généralement attendre jusqu’à deux mois avant d’avoir un rapport sexuel. « Il faut demander l’avis du chirurgien sur le délai de cicatrisation », conseille-t-elle.
Faut-il arrêter les frottis après une ablation de l’utérus ?
Interrogé par Allo Docteurs, Philippe Deschamps, gynécologue obstétricien, explique que les femmes qui ont subi cette opération doivent toujours être soumises à cet examen qu’elles doivent réaliser une fois par an pour prévenir les maladies dans un cas spécifique. « Quand on a enlevé l’utérus et les trompes, il n’y a plus de légitimité de faire des frottis sauf si on a fait une hystérectomie qu’on a enlevé l’utérus pour un cancer. L’expert ajoute que le médecin devra faire un frottis du fond du vagin pour déceler une potentielle récidive. C’est également le cas pour l’hystérectomie subtotale lors de descentes d’organes. « Le chirurgien qui réalise cette intervention doit expliquer à la patiente qu’elle doit continuer les frottis car elle a encore son col », recommande-t-il.