Coronavirus : des maisons de retraite reçoivent l’ordre de ne pas réanimer leurs patients

Publié le 5 septembre 2020

Depuis l’apparition du virus Sars-CoV-2, les personnes âgées ont fait l’objet de nombreuses préoccupations. Fragiles face à la menace du Covid-19, elles représentent un dossier sensible en temps de pandémie. En mars, l’Organisation Mondiale de la Santé évoquait une “tragédie humaine inimaginable” dans les Ehpad. Aujourd’hui, c’est en Angleterre que la situation inquiète,indique The Times. D’après le rapport d’un organisme de bienfaisance, des établissements de soins auraient reçu l’ordre général de “ne pas réanimer” (NPR) les patients.

Alors que la pandémie continue de progresser dans plusieurs pays du monde, le Royaume-Uni ne fait pas exception et souffre, lui aussi, de nombreux cas de Covid-19 sur son territoire. Face à l’afflux de malades dans les hôpitaux, certains s’inquiètent du sort des personnes âgées ou vulnérables.

Le Queen’s Nursing Institute, un organisme de bienfaisance britannique a mené un sondage auprès des membres du personnel dans des établissements de soins. Le professeur Alison Leary, à l’origine du rapport, a déclaré que les résultats étaient “inquiétants” et a appelé à une enquête.

Les ordres de “ne pas réanimer” ont été placés sans le consentement des familles

Le sondage a été mené auprès de 128 infirmières et gestionnaires de maisons de soins. Selon les réponses obtenues, 1 membre du personnel sur 10 aurait modifié les plans de réanimation sans discussion préalable avec les résidents, les membres de leur famille ou le personnel infirmier.

Selon le rapport, des responsables du NHS, le système de la santé publique au Royaume-Uni, ainsi que des médecins généralistes auraient demandé à ces établissements de placer des ordres NPR généraux pour tous leurs résidents et ce, afin de préserver la disponibilité des lits d’hôpitaux.

Parmi les membres du personnel ayant reçu l’ordre de changer les plans de réanimation des résidents, 50% travaillent dans des établissements de soins pour personnes âgées, et les 50% restants dans des foyers pour individus souffrant de troubles cognitifs ou d’apprentissage.

Les sondés ont également révélé que certains hôpitaux avaient instauré une politique de “non admission” pour les résidents de ces établissements de soins, même lorsqu’il ne s’agissait pas de cas de Covid-19. Par ailleurs, quelques-uns auraient également eu des difficultés à prendre rendez-vous auprès de médecins généralistes pour des personnes âgées.

La gestion des établissements de soins nécessite une vision rétrospective

Interrogé au sujet des NPR, un membre du personnel à l’identité anonyme a révélé : “On nous a recommandé de les mettre en place pour tous les résidents”.

Une décision qu’il jugeait contraire à l’éthique. “Nous avons agi conformément aux conseils médicaux et aux souhaits des résidents, et non conformément à une recommandation de placer un ordre général émise par un représentant du Clinical Care Group” a indiqué cette même source.

Début avril, The Telegraph révèle que Stephen Powis, directeur médical du NHS en Angleterre, avait écrit au personnel pour interdire l’usage des formulaires NPR après avoir découvert qu’un cabinet demandait aux patients âgés de les remplir pour empêcher l’intervention des services d’urgence en cas de Covid-19.

Un autre établissement aurait également demandé à des adultes autistes de signer ces formulaires pour ne pas être réanimés s’ils venaient à être gravement malades.

A l’approche de l’hiver qui peut s’avérer difficile pour ce groupe de personnes, Alison Leary, estime que la situation mérite d’être examinée plus sérieusement et appelle à mener une enquête.

“J’étais assez surprise de voir le nombre de personnes signalant des problèmes avec les NPR, puisque je ne m’attendais qu’à un ou deux”, indique l’auteure du rapport. “Mais ces 10% de sondés ont soulevé un problème, parce que des décisions générales ont été émises pour des populations entières, ou elles ont été imposées sans discussion avec les établissements de soins ou la famille ou les résidents, et c’est réellement inquiétant”, conclut la professeure.

Une hausse du nombre de clusters dans les Ehpad

Dans un rapport datant du 21 août dernier relayé par le Huff Post, Santé Publique France (SPF) indiquait une forte hausse du nombre de clusters dans les Ehpad, notamment entre le 11 et le 18 août. Le Premier ministre, Jean Castex, avait mis en garde les individus vulnérables dans la matinale de France Inter, appelant les personnes de plus de 75 ans, celles plus jeunes avec des pathologies lourdes ou souffrant de diabètes importants à se protéger face au nouveau coronavirus.

Une grande vigilance doit être maintenue dans ces établissements compte tenu de la fragilité de cette population dans laquelle survient le plus grand nombre de décès dus au SARS-COV-2” indiquait également Santé Publique France. Un avertissement salutaire à l’heure où le pays compte plus de 300 000 cas de contamination et plus de 30 700 décès.