Coronavirus : Les personnes du groupe sanguin A sont-ils plus vulnérables

Publié le 5 juin 2020

A l’heure où les informations sur le coronavirus circulent en continu, nombre d’entre elles suscitent la curiosité des internautes qui essaient d’en savoir plus sur les mécanismes du Sars-CoV-2. Parmi ces nouvelles qui composent notre fil d’actualité, une étude menée en Chine qui révèle que la vulnérabilité au Covid-19 pourrait être liée à notre groupe sanguin. Mais la prudence s’impose, il s’agirait d’une étude préliminaire qui, comme le révèlent nos confrères du journal Le Monde, n’a pas encore été validée. Passons ses résultats en revue. 

Si les internautes s’interrogent, c’est en raison d’une relation entre le risque de contamination par le Sars-Cov-2 et les groupes sanguins, mise en avant par des chercheurs des universités de Wuhan et de Shenzhen. Publiée le 16 mars, l’étude n’a pas manqué de faire son effet puisque selon les Décodeurs du quotidien français, plusieurs personnes se seraient effectivement posées la question, notamment en cherchant à savoir s’il s’agissait d’une info ou d’une intox sur le fil de discussion Whatsapp établi par Le Monde pour lutter contre la désinformation.

Que dit l’étude?

L’étude a porté sur 2 173 patients atteints par le nouveau coronavirus, issus de trois hôpitaux, dont deux à Wuhan et un à Shenzhen. Les chercheurs ont examiné les groupes sanguins de ces derniers en les comparant à un panel de personnes saines, dont 23 386 à Shenzhen et 3 694 à Wuhan.

Suite à leurs observations, les données collectées ont indiqué que les personnes de groupe sanguin O présenteraient un risque “significativement” plus faible d’être infectées par le Covid-19. En revanche, celles du groupe A auraient un risque “significativement” plus élevé de contracter la maladie.

Ces conclusions ont pu être obtenues en constatant qu’à Wuhan, “le groupe A est en effet surreprésenté avec une proportion de 38 % de malades ; viennent ensuite les patients de groupe B (26 %), O (26 %), et AB (10 %)”. En comparaison avec les personnes saines, “les individus de groupe O étaient plus nombreux (34 %), suivi des groupes A (32 %), B (25 %), et AB (9 %)”, peut-on lire sur Le Monde.

Des résultats similaires auraient également été observés à Shenzhen, avec un écart toutefois plus réduit entre les groupes O et A.

Les explications des scientifiques

Pour les chercheurs, les conclusions de l’étude sur les groupes sanguins A et O pourraient être liées aux anticorps produits par l’organisme lorsqu’il est en présence d’une substance étrangère, notamment à des “anticorps anti-A dans le sang”. Mais qu’est-ce que cela signifie ?

Selon les explications des Décodeurs, chaque groupe sanguin dispose d’antigènes à sa surface. Ces derniers varient d’un individu à l’autre. Ainsi, les personnes du groupe A disposent d’antigènes A et celles du groupe B d’antigènes B. Pour celles qui appartiennent au groupe sanguin AB, les deux antigènes sont présents. Quant au groupe O, il dispose d’antigènes H.

Lorsque notre système immunitaire est en présence d’un virus, ce dernier détectera alors ces antigènes pour produire des anticorps. Le groupe sanguin A ne pourra donc pas sécréter ces derniers contre ses propres antigènes, et finira par produire des anticorps anti-B. Le même principe s’applique au groupe B qui produira des anticorps anti-A, tandis que le groupe O formera des anticorps anti-A et anti-B.

Suite à leurs observations, les chercheurs chinois ont suggéré que “les anticorps anti-A pourraient en quelque sorte ralentir la pénétration du SARS-CoV-2”. Pour cette raison, les personnes de groupe O qui forment naturellement des anticorps anti-A et anti-B seraient alors “mieux armées” contre le virus à l’origine du Covid-19. Suivant ce même raisonnement, les sujets de groupe A seraient donc plus vulnérables, étant dans l’incapacité de produire des anticorps anti-A.

Des résultats préliminaires qui en appellent à la prudence

Si la prudence est de mise concernant cette publication, c’est parce que les auteurs de l’étude l’ont eux-même mis en avant, précisant qu’il “faut être prudent avant d’utiliser cette étude pour guider une pratique clinique, à l’heure actuelle”, avant d’ajouter que l’étude en question devrait encourager des recherches supplémentaires.

Par ailleurs, il s’agit avant tout d’une étude préliminaire et d’une prépublication n’ayant pas été examinée par des pairs, comme le souligne la plateforme scientifique MedRxiv.org en précisant “Les lecteurs doivent donc être conscients que ces travaux (…) ne sont peut-être pas finalisés et qu’ils peuvent contenir des erreurs. (…) Ils n’ont pas été approuvés par la communauté scientifique.”

Interrogé par le 20 Minutes, Jacques Le Pendu, chercheur à l’université de Nantes affirme également qu’un recul est nécessaire face à ces résultats encore préliminaires. “C’est de la science en marche, il faut être prudent”, déclare le spécialiste. Dans l’attente d’autres études menées par d’autres auteurs pour confirmer ou infirmer les observations chinoises, ce dernier conclut “Quel que soit votre groupe sanguin, il est donc toujours important de continuer à respecter les gestes qui protègent contre la contamination ».