Toulouse : la triste histoire de Kevin, 30 ans, SDF mort de solitude
A 30 ans, le jeune Kevin s’est donné la mort. Sans-abri, la vie a été éprouvante pour lui et il a préféré l’abréger. Découvrez l’histoire de cet homme invisible qui a été retrouvé inanimé dans la rue. « Il ne supportait pas d’être seul » affirme un bénévole.
Relayée par nos confrères de France 3 Occitanie, la mort de cet homme montre à quel point la détresse affective des sans-abri peut être tragique. Ce décès a ému les Toulousains dont certains ont participé aux obsèques.
La vie de ce jeune homme a basculé
Kevin s’en est allé un vendredi 13 alors qu’il n’avait que 30 ans. Il a été retrouvé seul après son décès. Surnommé Kéké, le jeune homme vivait dans la rue. Pourtant, rien ne le prédestinait à cette vie de laissé-pour-compte. Il était formé à la cuisine, travaillait et avait des parents qui l’aimaient. Les fréquentations lui ont valu de se retrouver sans toit et de rompre les liens avec sa famille. L’élan de solidarité de certaines personnes touchées par le sort des sans-abri soulage leur quotidien. C’est le cas pour cet homme qui a inventé des logements qui leurs étaient dédiés.
Une femme l’a entraîné dans la rue
Éperdu de sa petite amie, cette dernière le pousse à tout lâcher pour elle, y compris sa situation familiale et financière. Marc Perez, le responsable de l’association « La Maraude des Anges » témoigne de la personnalité de ce jeune homme. « Il marchait à l’affectif. Il ne supportait pas d’être seul »se souvient l’homme qui gère près de 80 bénévoles dédiés à l’accompagnement des personnes sans domicile fixe à Toulouse. Le dirigeant le côtoyait et avait même noué un lien avec ce garçon attachant. Pour lui, pas de doute, ce sont les mauvaises rencontres qui l’ont empêché de surmonter cette mauvaise passe.
« Le contact était coupé »
Après avoir tout quitté pour sa compagne, il se coupe du monde. Son père fait également partie des personnes à qui Kevin a renoncé. Il raconte qu’un jour, il lui a demandé de vider son appartement qui était à Montpellier. En janvier 2019, direction Toulouse pour Kevin après que la relation avec son père ait pris fin. Ce dernier se livre. « Depuis, je n’ai plus eu de nouvelles de lui, le contact était coupé » se remémore-t-il. Avant de s’en aller, le jeune homme a demandé à ses proches de ne pas s’en faire pour lui. Il leur a promis de les joindre « quand il irait mieux ». Malheureusement, il connaîtra un sort tragique.
« Jamais je n’aurai pensé qu’il en arriverait un jour à ça »
Après avoir vécu son idylle avec la femme qui l’a converti à cette vie de bohème, Kevin papillonne et est souvent accompagné par ses amantes. Lorsque la dernière le quitte, il ne supporte pas cette épreuve. Son suicide a succédé à ce chagrin d’amour. Son père témoigne : « Il avait quelques problèmes avec la boisson et a accumulé les mauvaises passes, mais jamais je n’aurai pensé qu’il en arriverait un jour à ça ». Ce cas individuel cache pourtant un véritable phénomène.
Pour Marc Perez, cette mort vient bien au-delà d’une peine de cœur. « Cette mort, c’est le drame de la solitude » affirme-t-il. Le militant qualifie le suicide dans cette population comme un fléau. « Il y’a de plus en plus de jeunes SDF qui se suicident notamment dans la catégorie 25-35 ans » déplore-t-il.
« Il y’a moins de gens dans la rue »
Pour le responsable de la Maraude des Anges, le confinement a joué un rôle capital dans la détresse des sans-abri. « Il ne faut pas oublier que la crise sanitaire est aussi une crise économique. Il y’a moins de gens dans la rue et ils donnent moins aux gens qui font la main » indique-t-il. Au-delà d’une baisse d’aumône,cela amoindrit également le lien social et rend plus incertain le lendemain. Pour le jeune Kevin, cette association a tenté de l’insérer en vain. Marc Perez raconte qu’avec son équipe, il a essayé de le convaincre de prendre un appartement mais qu’il disait que sa copine ne voulait pas. Donner de l’empathie à des personnes dans le besoin améliore la société. Cet homme a fait preuve d’une générosité hors normes.
Des Toulousains ont participé à une cagnotte pour ses obsèques
La mort du jeune homme n’est pas passée inaperçue et a touché les habitants de la ville rose. Celui qu’on appelait Kéké dans la rue allait se faire enterrer dans une fosse commune car ses parents n’avaient pas les moyens de lui prendre une tombe. C’est eux qui ont mis en place une cagnotte mobilisant les Toulousains qui ont participé à lui offrir des obsèques. Un au-revoir qui a fait prendre conscience de la cause des sans-abri.
De nombreux sans-abri souffrent de troubles de la santé mentale
Réalisée par une équipe de l’Université d’Aix-Marseille, une étude montre que de nombreux sans-abris sont atteints de pathologies mentales graves. Parmi les conclusions de cette recherche, des chiffres qui montrent qu’il s’agit d’un véritable danger chez cette population. Et pour cause, sur plus de 700 personnes sans domicile fixe dans quatre villes de France, on compte 70% de cas de schizophrénie et 30% de troubles bipolaires. Une problématique relayée par nos confrères des Echos. Le passage à l’acte suicidaire n’est pas rare. Cette maman sans-abri s’est jetée d’un pont avec son fils.