Comment la musique peut soigner les plantes ?

Publié le 11 août 2022
MAJ le 19 novembre 2024

Tout commence généralement par une histoire, qu’il s’agisse de science aussi bien que de romance, et tout finira, diton souvent, par des chansons. C’est en tout cas ce qui va se passer dans notre affaire. Voici donc tout d’abord notre histoire, pas toute neuve puisqu’elle se situe au milieu des années 1960.

Rien d’exaltant à première vue : il est question de la culture des ananas. Deux compagnies américaines se sont lancées dans la production à grande échelle de ce fruit apprécié et se livrent à l’époque une concurrence acharnée.

Des ananas meilleurs que les autres

Un ananas

Un ananas – source : spm

La première de ces grandes compagnies, appelons-la Alpha, a ses plantations à Hawaï. La seconde, qu’on baptisera Bêta, cultive les siennes en Amérique centrale, en Amérique du Sud et aux Antilles. Chacun chez soi, où est le problème ? Eh bien ! C’est pour Alpha que cela ne va pas très bien.

Les ananas de la compagnie Bêta sont bien meilleurs, un vrai délice, si bien que leurs ventes augmentent sans cesse au détriment de la compagnie rivale. On s’en inquiète évidemment chez Alpha, on fait venir sur place les meilleurs connaisseurs en ananas, les spécialistes, les experts, les savants et autres docteurs ès ananas.

Le détail qui fait toute la différence

Qu’est-ce qui ne va pas dans les ananas Alpha ? On contrôle et on compare les méthodes de travail des uns et des autres, on étudie les différences de climat, on scrute la composition des sols et on ne trouve rien du tout.

C’est finalement un psy, le Dr John Meiss, examinant les conditions de travail, qui remarque une différence, apparemment sans intérêt : les ouvriers Bêta, d’Amérique centrale et du Sud ainsi que des Antilles, s’activent toute la journée en chantant des gospels. Alors que chez Alpha, à Hawaï, on ne chante pas et on bosse sans entrain.

Sans intérêt, cette “petite” différence ? Le Dr Meiss a quand même un doute et pré conise l’embauche d’ouvriers du Panama. On tente l’expérience avec ces Panaméens qui, comme leurs collègues, chantent des gospels à longueur de journée ; et là, aussi incroyable que cela paraisse, les ananas Alpha vont bientôt égaler en excellence et succulence ceux du rival Bêta.

Les Anciens avaient raison

Voilà une trouvaille qui devrait faire aussitôt sensation. Mais on a trop de mal à y croire, et puis, entre les idées utiles et les idées néfastes, ce sont souvent ces dernières qui voyagent le plus vite.

Que la musique puisse favoriser la qualité des ananas et, plus largement, la culture des végétaux, c’est bien sûr une hypothèse formidable qui, cependant, passe longtemps inaperçue.

Car si de vieux paysans, héritiers de traditions lointaines, continuent çà et là de parler à leurs plantations ou de leur chanter des ritournelles, ce n’est, de l’avis général, que du folklore.

C’est curieusement, en ce domaine comme en d’autres, la science qui va retrouver de vieux chemins perdus et expliquer pourquoi les Anciens avaient raison, pour des raisons qu’ils ne pouvaient connaître.

À la fin des années 1970, un physicien français, Joël Sternheimer, spécialisé dans la recherche sur les particules, a une étrange intuition en se rappelant un épisode de son enfance. « La belle musique, comme celle de Mozart, fait donner du meilleur lait aux vaches », lui avait raconté une vieille dame. Et si c’était vrai ? se demande soudain le savant.

Comment Mozart agit sur la structure moléculaire des plantes

En attendant d’expérimenter sur les vaches, il a l’idée d’une expérience beaucoup plus facile à conduire. Car dans son esprit il ne s’agit pas seulement de l’influence de la musique sur le règne animal mais sur tous les organismes vivants, plantes comprises.

Son choix s’arrête sur la tomate, qu’il va tester en créant deux espaces distincts dans un jardin : d’un côté, des plants arrosés deux fois par jour ; d’un autre côté, plus loin, une plantation arrosée seulement une fois par jour mais bénéficiant, quelques minutes durant, d’un petit programme musical enregistré sur cassette et diffusé au milieu des tomates.

Résultat ? Difficile à croire : une production de tomates bien supérieure, en quantité et qualité, dans la partie musicale du jardin.

Expérience fabuleuse et prometteuse, surtout si l’on parvient à l’expliquer. Or Joël Sternheimer, ne l’oublions pas, est un grand physicien des particules ; il n’a pas effectué son expérience tout à fait au hasard, il a sa petite idée et c’est là qu’est le coup de génie.

Le savant s’est d’abord interrogé sur les protéines, par exemple la prolactine, la protéine qui fait venir le lait aux vaches, notamment celles, dit-on, qui écoutent du Mozart. L’intuition étonnante du savant, c’est qu’il doit y avoir une équivalence entre la structure moléculaire des protéines et la suite de notes qui influe sur leur action. Encore faut-il le démontrer…

Une mélodie dans nos cellules

On entre ici, bien sûr, dans le domaine de la recherche la plus pointue. L’explication du spécialiste est à peu près celle-ci : une protéine est une chaîne d’acides aminés, un peu comme un collier de perles.

Quand une protéine se constitue, chaque fois qu’un acide aminé vient comme une perle s’enfiler sur le collier – quatre à cinq fois par seconde –, une onde est émise dont on peut calculer la fréquence. Et ce que constate Joël Sternheimer, c’est que cette suite de fréquences n’est pas n’importe quoi mais au contraire semble composée, cohérente, comme une mélodie.

La fin des pesticides ?

Il est trop compliqué d’expliquer comment le savant a pu composer lui-même des mélodies équivalentes, mais il a trouvé la méthode pour obtenir des suites de notes qui “parlent” aux protéines et permettent soit d’en stimuler soit d’en inhiber la synthèse.

On imagine tout de suite ce qui peut en résulter : activer la production des plantes qu’on cultive ; neutraliser les plantes et organismes parasitaires. En somme, la possibilité de créer de véritables « formules magiques » autant que nécessaire. Et ce faisant, se passer d’engrais, de pesticides et autres fongicides, ou du moins en réduire l’emploi.

10 fois plus de tomates grâce à cette musique

Des tomates prêtes à être récoltées

Des tomates prêtes à être récoltées

Ces petites merveilles de « mélodies » douées de pouvoir sur les protéines et les plantes ont bientôt un nom qui s’impose d’évidence : les « protéodies ». Un test, cette fois à grande échelle, est mené au Sénégal, toujours sur les tomates, où il s’agit de stimuler une protéine de résistance à la sécheresse. Test tout à fait concluant, avec une production multipliée par dix.

La découverte de Joël Sternheimer, à première vue farfelue, commence à mériter le respect. Le physicien publie à l’Académie des Sciences, en 1983, un article fondateur : La musique des particules élémentaires. Puis il dépose en 1992 un brevet européen concernant son « Procédé de régulation épigénétique de la biosynthèse des protéines par résonance d’échelle ».

Ce n’est qu’en 2008 que le créateur des protéodies s’associe avec la société Genodics pour commencer à les commercialiser. Le nombre d’exploitants intéressés croît rapidement- sans pourtant susciter l’intérêt des instances officielles de l’agriculture.

Et pour soigner les êtres humains ?

Aujourd’hui, des gens tout à fait sérieux, ayant les pieds sur terre par profession, utilisent les protéodies avec méthode. C’est le cas en particulier de maraîchers et viticulteurs. Les vignerons adeptes des protéodies sont très contents d’avoir trouvé une nouvelle solution pour lutter contre le mildiou et surtout l’esca, un champignon ravageur sans remède auparavant.

Les producteurs du fameux Château Pape-Clément, en Bordelais, y ont notamment recours, en diffusant dans les vignes durant quelques minutes, par haut-parleur, une petite mélodie, deux fois par jour, durant le cycle végétatif.

Tous, maraîchers et viticulteurs (plus d’une centaine à ce jour), assurent que les protéodies sont d’une efficacité indiscutable et souvent spectaculaire.

Y a-t-il un rapport avec le fait que la musique a fréquemment un effet puissant sur l’être humain ? Les protéodies feront-elles un jour partie des protocoles de soins de certaines maladies ? Il existe déjà un service de ce type au Japon, à l’hôpital San Mariana de Tokyo. Des protéodies à la place de pilules, cachets et autres piqûres, qui ne serait partant ?