Potager : comment cultiver l’aubergine ?
« Noire de Pékin », « Monstrueuse de New York », « Ronde de Chine », mais surtout terriblement méditerranéenne, l’aubergine venue des savanes africaines est indispensable au potager ! Riche en thiamine, elle apporte sa contribution à une alimentation saine.
Le béribéri n’a d’amusant que son nom, c’est une terrible maladie provoquant des troubles neurologiques et cardiovasculaires graves, une grande fatigue et une détérioration de la fonction musculaire chez des malades répétant « Béri-béri », soit « je ne peux pas, je ne peux pas » en cinghalais. La maladie est connue depuis des temps antiques, mais il faut attendre 1630 et les travaux du docteur néerlandais Jakob de Bondt à Java pour faire le lien entre alimentation et maladie, et plus précisément avec la consommation excessive de riz blanc. En 1873, un autre médecin hollandais, Van Lent, améliore l’état de santé des marins malades en diminuant la ration de riz blanc. En parallèle, le japonais Takaki, en 1883, demande à l’empereur Meiji de revoir le régime alimentaire des marins. Lors d’une première expédition de neuf mois, 169 hommes d’équipage sont atteints de béri-béri et 25 en meurent, sur un total de 376 hommes. En intégrant du lait, de la viande, du pain et des légumes, et en diminuant la ration de riz blanc, seuls 16 marins d’un second équipage de 333 hommes développent la maladie. Et c’est finalement en 1897 que Christiaan Eijkman, à Batavia, conforta ces observations sur des poulets et des pigeons entièrement nourris de riz poli : l’origine de la maladie se situait dans l’absence de l’enveloppe des grains. Les travaux de Eijkman lui vaudront le prix Nobel de médecine en 1929. Quant à la molécule présente dans l’enveloppe du grain de riz et responsable de la prévention du béribéri, elle sera identifiée en 1936 par Robert Williams, c’est la thiamine ou vitamine B1.
Plante annuelle herbacée (vivace dans les pays chauds), de 60 à 80 cm. Feuilles entières, ovales et larges, recouvertes d’un duvet dense. Tiges arrondies, dressées et ramifiées. Fleurs hermaphrodites, simples, blanches à légèrement violacées. Fruit charnu, plus ou moins rond à allongé, recouvert d’une peau épaisse, luisante de couleur violet intense, presque noire.
La vitamine B1 au potager
Pour l’asperge, il faut avoir un grand jardin, car elle demande beaucoup de place. Le topinambour, il faut aimer et il dérange un peu les intestins. La meilleure solution pour de la bonne vitamine B1 au potager c’est de cultiver l’aubergine (mais vous allez voir, elle est gourmande en tout : en chaleur, en eau, en soleil et en éléments nutritifs) et le fenouil, et de compléter par des petits pois (sur lesquels nous reviendrons dans un prochain article). L’apport journalier recommandé en vitamine B1 est de 1,1 mg, on la trouve aussi dans la levure (11 mg/100 g), le son du riz (2,75 mg/100 g), la spiruline (2,38 mg/100 g), les céréales en général et les graines non décortiquées (lin, sésame…).
Teneur moyenne en vitamine B1/100 g de quelques légumes :
- Aubergine : 0,20 mg
- Asperge : 0,20 mg
- Topinambour : 0,20 mg
- Maïs : 0,22 mg
- Fenouil : 0,23 mg
- Petit pois : 0,40 m
Semez à partir de février-mars
Pour assurer une levée régulière, placez les semences dans le bac à légumes du réfrigérateur, la température y est d’environ 4 à 5 °C, pendant 4 à 6 jours avant de semer. En vous appliquant un peu vous pouvez déposer une seule graine par godet, à recouvrir tout juste de terreau pour la préserver de la lumière. Conservez à 16 °C au moins et mieux encore à 20 °C à l’intérieur. Dès la germination, placez en pleine lumière pour éviter aux plants de « filer », de s’étioler.
Plantez en mai
Patientez jusqu’au mois de mai pour la plantation en place définitive. Laissez 50 à 60 cm en tous sens et plantez en situation bien ensoleillée, dans une bonne terre de jardin. Lorsque les plants mesurent 30 cm, buttez le pied pour les renforcer, en ramenant la terre contre le collet de la plante. Par la même occasion, tuteurez.
Paillez en juin
À l’approche des mois chauds, paillez le pied pour conserver la terre humide. Lorsque les fleurs et les premiers fruits sont visibles, taillez l’extrémité des tiges pour favoriser le grossissement des aubergines. Conservez seulement 5 fruits par pieds, jusqu’à 7 dans le Sud. Récoltez de juillet à la fin de l’automne. La tentation est toujours grande de laisser grossir les fruits, d’autant plus que leur nombre par pied est relative[1]ment limité, c’est une erreur courante. Car en grossissant, et même si la plante ne manque pas d’eau, la chair devient rapidement sèche et parcheminée et sa qualité baisse rapidement. Cueillez des fruits petits lorsque leur peau est bien brillante et leur chair bien ferme sous la pression du doigt.
Les 5 profiteurs de l’été
Le mildiou : il y a des années à mildiou, qui touche toutes les solanacées (pomme de terre, tomate…), l’aubergine n’y échappe pas. Il se traduit par l’apparition de taches gris vert sur les feuilles, et blanchâtre à violacé au revers. Des plantes robustes sont moins exposées, arrosez préventivement avec une décoction de prêle pour les renforcer.
L’oïdium: les périodes humides et chaudes sont favorables à ce champignon qui se traduit par de petites taches blanches duveteuses. Traitez avec du soufre et renouvelez autant de fois que nécessaire, le produit est compatible avec le jardinage biologique.
Les doryphores: aïe ! Ramassez ces beaux insectes pour les brûler sans vergogne. Vérifiez les pontes d’œufs jaunes au revers des feuilles. Semez du lin bleu entre les rangs pour limiter le problème.
Les aleurodes: comme sur toutes les solanacées, ces petites mouches blanches se cachent (mal) au revers des feuilles. Appliquez un insecticide végétal, renouvelez si besoin et évitez la sécheresse pour limiter leur prolifération.
Les pucerons: ils sont parfaitement visibles sur les jeunes pousses feuillées. Traitez par un insecticide végétal.
Les bonnes aubergines
C’est l’un des légumes pour lesquels les hybrides F1 ont fait de gros progrès, ils concernent aussi l’amateur. Toutefois, vous pouvez cultiver les anciennes variétés toujours d’actualité depuis plus de 120 ans.
- « De Barbentane » : encore désignée « Violette de Barbentane », c’est l’aubergine de référence dans le Sud pour les anciennes variétés, et historique par ailleurs. Vigoureuse et productive, elle donne des fruits allongés de 20 cm, presque cylindriques, d’un violet noir brillant.
- « Violette longue » : aussi appelée « Violetta lunga », c’est une aubergine à fruit ovale, oblong, en forme de massue, à épiderme très lisse, violet-pourpre. Une variété qui réussit particulièrement dans le Midi, où elle produit en 5 à 6 mois, mais bien adaptée aux climats frais. Sa chair tendre et peu amère renferme peu de pépins.
- « Black Beauty » : variété précoce, au cycle court – les premières récoltes se font 80 jours après le semis – à fruits piriformes et massifs, de 15 cm ; très bonne productivité, même dans les régions froides. C’est une des plus répandues sur les marchés.
- « Violette de Florence » : très gros fruits ronds et côtelés, mauves striés de blanc, variété productive (8 à 10 fruits par pied). Chair sucrée, peu de pépins, idéale pour cuisiner les aubergines farcies !
Conseil de jardinier
Une gamme de semences contient environ 250 graines, plus qu’il ne vous en faut pour votre production ! Il vaut mieux conserver peu de fruits par pieds (4 pour les très gros et jusqu’à 7-8 pour les courants) et planter plus de pieds